Je ne suis pas peu fière de la communauté permaculturelle d’Abitibi-Témiscamingue. Quand on a commencé à parler du concept il y a près de 10 ans, il y avait quelques adeptes seulement. Maintenant, les initiatives personnelles et professionnelles sont nombreuses et on peut s’en réjouir.

Quand on pense à la permaculture, on passe souvent par le fameux design de permaculture, le plan où on place tous les éléments pour que notre projet devienne le plus autonome possible. Puis, on commence et on s’aperçoit que « le plan » ne sera pas en place aussi vite qu’on pensait! C’est tout à fait normal, ça prend du temps refaire un écosystème! Mais ça finit par se concrétiser, je vous assure.  

Cette année, pour célébrer la journée de la permaculture, je vous propose donc des témoignages de gens qui ont entrepris cette démarche.


Témoignage de Marie-Éve Boisclair

Je commence par mon propre projet. Un projet domiciliaire :avoir un petit écosystème productif et vivant. Pour ma part, je m’installais en 2015 dans un nouveau développement. Malheureusement, tout a été rasé pour les constructions. Mon point de départ était donc un terrain de gumbo vide. Je me rappelle encore la première année, j’avais des fleurs en pots dans un cercle en attendant de les planter, dont la monarde. Un pauvre petit colibri s’y est précipité! C’étaient les seules fleurs des environs! Aujourd’hui, après 8 ans, ça a bien changé. La biodiversité est grande sur mon terrain et la production est bonne. 

Depuis 2015, j’ai planté 9 arbres fruitiers, une douzaine d’arbustes fruitiers et des dizaines et des dizaines de plantes. Les pruniers-cerisiers ont commencé à produire, un des 2 poiriers a fait des fleurs l’an passé. Pour les pommiers, il faudra attendre puisque j’ai vécu des échecs de ce côté. Une des plus grandes leçons que je tire de ses 8 ans : ça va prendre du temps! Vouloir accélérer les choses ne fonctionnera pas. On nous dit : prépare d’abord ton sol, puis plantes tes arbres. Mais on est pressé, on plante rapidement dans un sol non adapté à l’arbre et on finit par perdre l’arbre. Donc, au final, on n’a pas gagné de temps. Mais on apprend!

Depuis 3 ans, j’observe des oiseaux sur mon terrain. Mon écosystème a enfin de quoi les intéresser! J’observe des quantités industrielles de pollinisateurs indigènes et ça me rend folle de joie!! J’ai aussi des musaraignes avec qui le partage des ressources est parfois compliqué! J’ai failli perdre toute mon aspergeraie l’an passé parce que les musaraignes ont mangé les racines. C’était donc retour à la case départ pour l’aspergeraie, les plants ont fait 2-3 tiges seulement alors qu’ils avaient 5 ans! Deux n’ont jamais repoussé. Cette année, un prunier pourrait ne pas survivre, rongé par les musaraignes, je ne sais pas si le minuscule chemin d’écorce qu’ils ont laissé sera suffisant pour la survie de l’arbre.  La cohabitation avec les musaraignes  me donne du  fil à retordre. J’ai aussi eu le plaisir de voir une marmotte, pour qui j’étais le pied-à-terre en ville! Elle s’était fait une cachette, mais ce n’était pas un nid, elle n’y habitait pas, mais s’y cachait quand elle venait manger chez moi. J’ai aussi vu des couleuvres. L’équilibre s’installe donc tranquillement sur mon terrain, avec une vie grandissante à chaque année et une production de fruits et légumes grandissante aussi.

Après 8 ans, j’ai enfin l’impression que ça commence à ressembler à mon plan! Alors retenez ceci, prenez votre temps et soyez patient, la satisfaction qui en découle en vaut certainement la peine!

Témoignage de Sylvie-Claude Côté
la microferme florale Ma tante Juliette
Abitibi-Ouest.

Voici son témoignage :

« Robert, il y a beaucoup trop de pelouse! C’est beau, oui… Quelques jours, mais sinon? À quoi ça sert?  Assise sur le tracteur à gazon, je trouve cette tâche ennuyante et vide de sens. Mon amoureux est un peu déstabilisé par mes propos, je pense qu’il anticipe un peu les projets à venir. 

 

Il y a presque 10 ans, j’ai décidé de m’intéresser VRAIMENT à l’environnement, à la conservation de la biodiversité et à l’agriculture. Mes recherches m’ont menée vers un concept que je ne connaissais pas : la permaculture. J’ai entendu une chorale chanter dans ma  tête! Par la suite, mes apprentissages m’ont apportée vers la santé des sols, vers les techniques agricoles manuelles et les changements climatiques, mais la permaculture est toujours demeurée en toile de fond. 

 

Effectivement, la logique derrière les principes de la permaculture m’ont réconfortée. Cultiver la diversité, inclure les animaux, les végétaux et l’humain pour que tous les éléments soient mis en relation. Les besoins et les fonctions de tous sont pris en considération. WOW! Donc, nous avions déjà des animaux (volailles, lapins, cheval, ânes), mais je devais occuper mieux l’espace et produire des aliments pour assurer une certaine pérennité. En ce moment, nous plantons des végétaux vivaces chaque année, le sol est minimalement travaillé et il est recouvert d’un paillis, le fumier des animaux est utilisé, et surtout, je réfléchis à la place des éléments que j’introduis. Maintenant, grâce aux principes de la permaculture, j’ai le réflexe de penser aux pollinisateurs, à l’énergie utilisée, aux déchets produits, etc. J’essaie de m’orienter vers une boucle sans trop déranger l’écosystème. 

 

J’ai aussi décidé de faire ma part pour l’environnement en cultivant des fleurs coupées : offrir une alternative aux fleurs importées et remplies de produits dangereux pour l’équilibre de la planète. Je m’inspire de la permaculture pour faire mes choix de cultures et des techniques utilisées. Toutefois, si tu viens à la maison, tu t’apercevras vite que mes aménagements ne sont pas réellement permaculturels. Je m’en inspire et surtout je suis patiente! J’attends, je respecte le rythme de la nature et je réfléchis aux choix et aux conséquences de mes actions. Pour le moment, la permaculture est vraiment bien installée dans mon cœur et dans ma tête et j’essaie de l’appliquer du mieux que je peux dans le présent. Ces principes m’accompagnent et me rappellent que je suis responsable de mon milieu et de demain. »

Témoignage de Caroline et Patrick
Val d’Or 

Voici son témoignage :

Patrick et Caroline de Val d’Or se sont aussi inspirés de la permaculture pour se créer un foyer chaleureux et tentent d’intégrer 2 principes centraux au quotidien. Voici leur témoignage.

« Je dirais que les deux principes de la permaculture qui nous guident le plus Patrick et moi sont: ne pas produire de déchet et créer une production. Nous avons vraiment un désir d’atteindre une plus grande autonomie alimentaire et de connaître la provenance des aliments que nous consommons. Chaque année, nous tentons d’augmenter la biodiversité de notre terrain en plantant des arbres fruitiers et des plantes indigènes. 

On consacre beaucoup de temps à notre domicile en rénovant avec des matériaux naturels ou recyclés. Nous essayons également de tendre le plus possible vers le zéro déchet en achetant des aliments en vrac ou des vêtements dans les friperies. En plus de réduire nos déchets domestiques, nous récupérons les déchets de nombreuses familles comme le gras de bacon pour faire notre savon, les rouleaux de papier toilette et pintes de lait pour mettre au jardin. Nos familles et amis nous gardent également leurs feuilles mortes et leurs déchets organiques pour que nous soyons autonomes en amendements au jardin. 

Nous avons le désir de nous connecter avec d’autres personnes qui ont les mêmes rêves que nous et c’est pour cela que nous nous impliquons  dans des organismes à but non lucratif qui ont des missions qui rejoignent nos valeurs comme l’espace de coworking de Val-d’Or. Au plaisir de parler permaculture avec vous! »

 

Comme vous le voyez, il y a plusieurs façons de « vivre » la permaculture et d’en intégrer les principes dans notre vie. Vous avez ici trois exemples de la vraie vie qui se déroulent en Abitibi, mais il y en a bien plus! Et ça c’est motivant!

 

En terminant, si vous êtes encore en réflexion, si vous attendez que tout soit prêt avant de commencer, je vous le dis : commencez! Commencez parce que la permaculture ne requiert pas d’être parfait! Commencez parce que ça prend du temps à un écosystème de se construire, année après année. Un petit coup de pouce de votre côté, un petit coup de pouce de mère nature. 

 

Bonne journée de la permaculture à tous!